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Le rôle du café dans les traditions culturelles

Café et culture : une histoire d’inspiration et de partage

Tradition turque : le café du mariage

En Turquie, la demande en mariage est appelée : kiz isteme. Durant ce moment crucial dans la vie d’un jeune homme, il se doit de rencontrer la famille. Le prétendant offre fréquemment quelques cadeaux, il peut s’agir de bijoux par exemple. L'objectif premier réside dans l’acceptation de cette demande pour ensuite célébrer l’officialisation de l’engagement. Lors de cet échange, les deux familles respectives se rencontrent. Le père de la fiancée occupe une place clé, puisqu’il remet symboliquement la main de sa fille au futur marié.

Dans les traditions turques, la fiancée détient un rôle important dans cet entretien. Elle a comme privilège de servir un café en y ajoutant des ingrédients plutôt originaux ! En effet, la coutume veut que la potentielle fiancée dépose du miel pour indiquer au prétendant qu’elle accepte sa demande. Néanmoins, si elle souhaite la refuser, du sel sera cette fois-ci mélangé au café. Ici, le miel reflète la douceur de l’amour, de même que le consentement favorable de la future épouse. Le sel, lui, symbolise un refus. Nous remarquons que cette coutume subtile permet de ne pas mettre dans l’embarras le futur fiancé. Si le garçon reconnaît le sel dans son breuvage, il doit tout simplement faire comprendre discrètement à ses parents de partir. Cette tradition souligne l’importance du respect et de la politesse dans la culture turque. D’autres variantes de ce rite existent, notamment certaines qui expliquent que le sel n’est pas forcément un signe de désaccord de l’union. Effectivement, il pourrait aussi signifier que la future fiancée a pour projet de tester son mari dans cette “épreuve”. Cette tradition est plutôt cocasse, car le prétendant doit essayer de ne pas montrer sa réaction quant aux saveurs surprenantes de sa boisson. C’est une manière de percevoir si le marié est déterminé à épouser la demoiselle. Ce rituel permet de tester implicitement la capacité de l’homme à se comporter comme un mari fort, apte à supporter les responsabilités d’une vie à deux. S’il parvient à rester impassible, cela est de bon augure pour le mariage à venir.

Café expresso dans une petite tasse, délicatement posé sur des palmiers

Le café bédouin, un lien sacré entre hôtes et invités

Chez les Bédouins, le café peut aller jusqu’à être considéré comme un code d’honneur. Les Bédouins sont un peuple nomade arabe, qui était à l’origine installé exclusivement dans des régions désertiques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Aujourd’hui, plus sédentarisé, ce peuple accorde une importance particulière au café. Souvent préparée de manière traditionnelle, cette boisson détient un rôle clé dans l’hospitalité des invités : c’est un rituel social. Le café est servi dans une cafetière traditionnelle appelée dallah.

Trois étapes sont alors respectées : Finjan Al-Haif (la tasse du maître de maison), Finjan Al-Dhaif (la tasse de l’invité) et Finjan Al-Saif (la tasse de l’épée). La première, la tasse du maître de maison, consiste en la dégustation du café par le propriétaire des lieux. Cela permet de s’assurer de la qualité du café, qui est primordiale, car elle transmet les valeurs respectueuses de l’hôte. Un café peu goûteux pourrait être perçu comme un manque d’attention aux invités, ce qui pourrait potentiellement nuire à l’image de celui qui reçoit. Ensuite, la tasse est offerte à l’invité, cela reflète le bon accueil de l’hôte. Le propriétaire remplit la tasse plusieurs fois, c’est ensuite à l’invité de lui indiquer qu’il en a suffisamment bu. Si l’invité en consomme une grande quantité, les Bédouins estiment qu’il est satisfait de son accueil. Enfin, ce rituel autour du café se termine par Finjan Al-Saif, la tasse de l’épée. Elle symbolise un engagement réciproque de protection entre l’hôte et son invité. Une alliance se consolide. Par exemple, le café vient assurer des promesses de sécurité mutuelle, cela est semblable à un “pacte”. Parfois un autre pilier est évoqué, nommé : Finjan Al-Khashm, on l’appelle en français la “tasse du nez”. Il est dit qu’elle est consommée par une personne de haut rang parmi les hôtes, pour être ensuite partagée aux invités. Cette étape n’est pas forcément récurrente dans la préparation du café, certains disent qu’elle est plutôt réalisée durant de grandes cérémonies.

Chez les Bédouins, le café n’est pas une simple boisson à base de graines de caféiers. Il s'agit d'un véritable devoir qui reflète leurs principes honorables. Au-delà de la simple consommation, le café bédouin sert également de levier dans le maintien des liens sociaux. Lorsqu’un hôte bédouin offre du café à un invité, il intègre de manière symbolique ce dernier dans son cercle social. Les gestes que nécessite le service du café, comme par exemple le secouement de la tasse, expriment une communication non verbale chargée de sens. Dès lors qu’un invité attendu entre dans la maison du propriétaire, il se voit protégé par son hôte bédouin. La solidarité de la communauté bédouine est par conséquent mise en avant par leur grande hospitalité, inhérente à leur culture. Le café bédouin occupe une place cruciale dans leur quotidien, il sert à la fois d’instrument dans les processus de réconciliation (sulha en arabe), de négociation et de célébration.

Pâtisseries gourmandes trempées dans un café latte

Rejoignons désormais le nord de l’Europe, et plus précisément la Suède. Pour les Suédois, la pause-café est plus qu’indispensable, on l’appelle la fika. Ils n’hésitent pas à l’accompagner de pâtisseries. Ce n’est pas une simple pause, mais un rituel spécifique dans la journée qui daterait du début du XXème siècle. Du verlan suédois kaffi, une autre forme de kaffe voulant dire café, la fika permet un véritable temps de lien social et de détente.
Cette tradition suédoise est souvent réalisée en compagnie de douceurs sucrées, comme par exemple de petits desserts à la cardamome.

Ainsi, une à deux fois par jour, les Suédois profitent de cet instant apaisant. Particulièrement présente dans le domaine du travail, la fika donne l’opportunité de se détendre du stress du travail, de sociabiliser avec ses collègues et de reprendre quelques forces autour d’un bon café ! D’une durée d’environ 30 à 40 minutes, cette pause rituelle est très attendue par les Suédois, elle leur permet de se ressourcer. La fika revêt en effet une grande importance, puisqu'elle donne l’opportunité de bénéficier d’une coupure nécessaire au travail, milieu qui peut être parfois anxiogène. Pour l’apprécier comme il se doit, il est impératif de partager un moment chaleureux avec ses collègues en échangeant avec eux. Il ne s’agit pas seulement de boire un café seul pendant quelques minutes, mais de profiter de ce moment pour se changer les idées. Avec ses collègues ou ses proches, la fika peut se vivre à tout moment de la journée, bien qu’en général beaucoup de Suédois la pratique entre 10 et 15 heures. Puis, il ne faut pas se trouver nécessairement au travail pour bénéficier de cet instant aux divers avantages. Chez soi ou bien encore dans un coffee-shop, la fika s’exerce dans des environnements et des lieux variés. Le mot d’ordre à respecter pour une fika réussie, est de la vivre en compagnie de quelqu’un et si possible avec des brioches à la cannelle, dont raffolent les Suédois !

Le café en Suède n’a toutefois pas toujours été accessible à tous les types de classes. Au XVIIIème siècle, ce breuvage, principalement réservé aux élites, était considéré comme un produit de luxe à l’époque. Aujourd’hui, le café fait partie intégrante du quotidien de tous les Suédois dans notre société moderne. Selon une étude menée par l’institut de sondage Cint pour la marque Tassimo, les Suédois consacreraient en moyenne 52 minutes par jour pour la fika. Ces chiffres révélateurs soulignent que la fika occupe une place centrale dans la vie de la population suédoise. Cette pause gourmande peut être considérée comme un élément à part entière de leur culture. Il est d’ailleurs perçu comme impoli de refuser de participer à la fika, soulignant ainsi son importance dans la vie sociale en Suède.

Deux cafés aux arômes intenses dans une tasse noire et une tasse blanche

Café et deuil au Levant : traditions et symboles du Qahwa Murra

Dans la culture levantine, particulièrement en Syrie, au Liban et en Palestine, le café illustre plusieurs fonctions sociales. Ces pays ont un rapport très intime avec le café, puisqu'il est issu de leur héritage arabe et ottoman, il reflète leur identité culturelle. Le café est présent dans les rites, les moments de convivialité, mais aussi de deuil.
En arabe, le café amer est nommé le Qahwa murra, on le sert par exemple dans de petites tasses quand des funérailles sont organisées. On évite de mettre du sucre dedans et l’on torréfie davantage les grains pour faire ressortir l’amertume. Le café et la mort ont en effet un lien étroit dans les pays du Levant. Sa couleur sombre rappelle le moment où la grande faucheuse rappelle une âme. L’amertume présente dans ce café intense et non sucré fait ainsi écho à l’amertume de la vie, dont la mort est une étape inévitable. En Syrie, les femmes préparent le café, qui est ensuite servi pendant trois jours. On ajoute parfois de la cardamome dans le café, c’est un élément traditionnel de la culture culinaire levantine. La cardamome symbolise l’hospitalité, facilite la digestion et adoucit légèrement l’amertume. Nous pouvons également relever que durant cette dure épreuve, il est inadapté de complimenter ou de remercier pour café. Cela fait partie des traditions liées au Qahwa murra dans ce contexte particulier. Par ailleurs, il est coutume de boire en silence la boisson pour honorer la mémoire des défunts.

Néanmoins, bien que le café symbolise la douleur de la perte d’un être cher, il joue également une fonction sociale essentielle. Cette tradition offre l’occasion de réunir les proches. Traverser ce moment difficile à plusieurs apporte du réconfort et permet de commémorer ensemble la mémoire du défunt. Le café devient un vecteur de lien social unissant les endeuillés. Dans certains pays du Levant, des lectures de textes coraniques accompagnent ces moments pour l’hommage au mort. Parfois, peu de mots sont prononcés, la dégustation du café reflète ainsi l’importance du langage non verbal, qui, sans mots, incarne à la fois la tristesse d’une perte et l’unicité de la communauté face à celle-ci.